RadioSouvenirsFM

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jeudi 26 février 2009

Technologie_Le téléviseur invente le musée imaginaire



Capables d'afficher les images d'une clé USB ou téléchargées sur une galerie en ligne, les écrans plats renouvellent l'intérêt pour les œuvres d'art.

Et si le téléviseur devenait le média privilégié pour se constituer un musée personnel ? Sur la plupart des modèles actuels, il suffit de brancher une clé USB contenant des images pour transformer l'écran en une sorte de cadre photo numérique grand format. Et rien n'empêche d'afficher des toiles de maître au lieu des photos de vacances. Un moyen original d'animer le mur. «Quand nous recevons des amis, nous faisons défiler des tableaux que nous apprécions particulièrement, surtout des artistes contemporains, témoigne Julie, 42 ans, qui vient de s'équiper d'un téléviseur Sharp Aquos. Ça crée une atmosphère agréable, et puis c'est un peu comme si on possédait des œuvres d'art pour notre plaisir personnel.»

L'arrivée des modèles qui s'accrochent au mur ou qui prennent l'aspect de cadres a renforcé la tendance. On voit même des fabricants proposer des encadrements à installer sur l'écran, qui imitent à la perfection les bordures d'un tableau, comme le Concept Cadre de So-Concept ou la série VisionArt vendue par Fastframe. Mais l'aspect physique du téléviseur n'est qu'accessoire. C'est le contenu qui retient maintenant les consommateurs. Avec leur encadrement blanc et leur dispositif d'accrochage au mur, certains modèles comme les téléviseurs-cadres Bravia de Sony ne sont pas seulement conçus pour se fondre dans le décor d'une salle de séjour. Ils sont livrés avec une série d'images préchargées qui peuvent défiler sous forme de diaporama. De son côté, Loewe n'hésite pas à faire appel à un artiste, Winfried Wolk, pour que sa gamme de téléviseurs Art SL se transforme en « œuvre d'art dynamique » lorsqu'ils sont éteints.

Le but ? Encourager les particuliers à découvrir une nouvelle fonction de leur écran. Et démontrer l'avantage du téléviseur, qui permet d'observer des œuvres d'art sur une surface comparable à celle d'un tableau. Matisse, Cézanne, Turner : choisissez vos artistes préférés et créez votre musée personnel. Comme avec les livres numériques, un seul écran suffit pour accéder à plusieurs œuvres. «C'est aussi un moyen d'occuper les soirées sans télévision, poursuit Julie, et d'inciter les enfants à regarder autre chose que des programmes sans intérêt. Discuter des couleurs d'un Mondrian ou de l'inspiration d'un Munch est plus nourrissant que rester passif devant une émission de variétés.»

Accéder à des galeries sur Internet

Les derniers modèles de Samsung et de Sony vont encore plus loin. Ils ne se contentent plus de fournir une connexion USB et des reproductions d'œuvres d'art enregistrées en mémoire. Ils permettent d'accéder, à partir du téléviseur, à des contenus en ligne, comme le site de partage de photos Flicker, ou à des galeries. Une étape de plus vers le musée sur mesure, rendue possible grâce à la liaison Internet qui équipe ces modèles. Plus conceptuel encore : la chaîne de télévision Souvenirs From Earth, actuellement diffusée sur le bouquet ADSL de Free, ambitionne de transformer le téléviseur en « terminal d'art ». Elle ne programme que des vidéos d'art spécialement conçues pour les grands écrans plats : scènes de rue, objets urbains en mouvement, performances originales, etc. Le tout sans commentaire mais accompagné de musique électronique. Les séquences, rapidement présentées par un texte incrusté à l'écran, durent en moyenne une vingtaine de minutes. L'utilisation du téléviseur pour présenter des œuvres d'art, ou comme vecteur de création artistique, n'est pas récente. De nombreux musées utilisent des écrans pour mettre en valeur des œuvres ou pour montrer des productions vidéo artistiques. La nouveauté, c'est la possibilité de domestiquer l'art, de l'amener à la maison, au lieu de devoir se rendre dans un musée ou une galerie. Une tendance comparable à celle du home cinéma, qui a permis aux consommateurs de domestiquer le cinéma, sans avoir à fréquenter les salles de projection.

S'approvisionner en images : oui, mais…

Clé USB, accès à des contenus sur Internet…, avec ces nouveaux téléviseurs, n'importe qui peut se constituer un musée personnel. Il suffit de piocher dans les galeries en ligne ou les sites Web spécialisés dans l'art, certains étant payants. À condition de trouver des reproductions en haute définition, sans quoi l'image sera déformée et pixelisée. L'idéal est de récupérer des photos de dimensions égales ou supérieures à la résolution du téléviseur, soit 1 280 × 720 ou 1920 × 1080. Évidemment, cette pratique n'échappe pas aux risques d'un piratage d'un genre nouveau. Pour l'instant, la législation n'a rien prévu pour les particuliers qui téléchargent des reproductions de tableaux pour les afficher sur leur téléviseur. «La copie d'une œuvre d'art pour en profiter sur son écran, dans un cadre privé, devrait relever du droit à la copie privée, mais ce droit ne concerne pas encore les téléviseurs, explique Christiane Ramonbordes, directrice générale de la Société des auteurs dans les arts graphiques et plastiques (Adagp), chargée de la gestion des droits d'auteur dans les arts visuels. Nous nous sommes penchés sur le cas des cadres photo numériques, mais avec les écrans grand format, ça prend une autre dimension.» En principe, rien n'interdit de s'approvisionner en œuvres tombées dans le domaine public, ce qui est le cas des toiles dont l'artiste est mort depuis plus de soixante-dix ans. «Vous pouvez utiliser des œuvres de Giotto, de Monet et de Van Gogh, numérisées sur un livre, importées d'un cédérom ou téléchargées sur Internet. Mais il faudrait aussi obtenir l'autorisation de celui qui a photographié l'œuvre.» Mais il y a peu de chances qu'un inspecteur aille vérifier chez vous si vous disposez des droits nécessaires.

Quant au constructeur qui propose sur son téléviseur des œuvres d'art, «il doit avoir passé des accords avec les auteurs ou leurs représentants pour pouvoir fournir des images d'œuvres d'art avec son téléviseur ou pour donner accès à une banque d'images en ligne, souligne Christiane Ramonbordes. Nous sommes ici dans le domaine du droit exclusif. » Une raison qui a sans doute encouragé Sony à privilégier, sur ses nouveaux modèles, les photos au détriment des reproductions d'œuvres d'art. Officiellement, le géant japonais entend «mettre en avant les artistes du Sony World Photography Awards, le plus grand concours de photo existant à l'heure actuelle ».

Source : LeFigaro.fr Par : Didier Sanz

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